MAL DE VENTRE - QUAND S’INQUIÉTER ?

3 years ago

Gastro-entérite, diarrhées, constipation, brûlures d’estomac… Les troubles digestifs sont souvent bénins et fortement liés à notre alimentation. Mais, lorsqu’ils sont récurrents, ils peuvent aussi cacher des maladies plus sévères, comme un ulcère de l’estomac ou un cancer digestif. Dans tous les cas, une consultation s’impose s’ils durent plus d’une semaine.
Ballonnements, nausées, transit intestinal perturbé, crampes ou douleurs abdominales : ce cortège de symptômes n’accompagne pas seulement les gastro-entérites.
Selon un sondage réalisé il y a 3 ans par l’Ifop pour la Fondation PiLeJe, près d’un Français sur deux souffrirait d’un de ces troubles digestifs. Un désagrément tel qu’il retentit parfois sur leurs activités quotidiennes et leurs relations sociales. Pourtant, seuls 3 % d’entre eux souffriraient d’une pathologie digestive chronique diagnostiquée. Les autres naviguent à vue, sans trop savoir s’ils doivent attendre que ça passe, modifier leur alimentation, se rendre à la pharmacie pour un conseil ou consulter un médecin. Parmi les 50 % de personnes qui font appel à un professionnel de
santé, 37 % avouent avoir attendu 2 à 4 semaines, et 9 % plus d’un mois. Le plus souvent, les troubles digestifs n’ont pas de caractère d’urgence. Mais il ne faut pas les laisser traîner sans solliciter un avis médical, même si le diagnostic n’est pas toujours simple. Car les maux de ventre regroupent des symptômes communs à de nombreuses maladies plus ou moins sévères.
Les pathologies digestives, qui représentent le motif d’hospitalisation le plus fréquent en France, sont en augmentation. La majorité des maux de ventre ne relèvent pas d’une maladie engageant le pronostic vital, mais dès lors qu’ils sont récurrents, ils méritent d’être explorés pour être pris en charge.
LES SIGNES À NE PAS NÉGLIGER
Fréquents, et plus ou moins faciles à diagnostiquer, les maux de ventre sont un piège », résume le Pr Michel Dapoigny, gastro-entérologue au CHU
de Clermont-Ferrand. « Le premier critère pour savoir quand consulter, sans même définir la localisation de la douleur,
c’est le contexte de son apparition et son intensité », poursuit le spécialiste.
Toute douleur vive, survenue brutalement, peut relever d’une pathologie aiguë, nécessitant un diagnostic rapide et une intervention chirurgicale urgente. Il faut d’autant moins attendre qu’elle s’accompagne de signes associés tels qu’une fièvre plus ou moins élevée ou des troubles digestifs (vomissements, diarrhée ou constipation).
Étant donné le nombre d’organes que referme la cavité abdominale, les causes potentielles sont nombreuses. Chez une femme, une douleur aiguë au bas-ventre peut ne pas être liée au système digestif,  mais révéler une infection urinaire ou un problème gynécologique (kyste ovarien, grossesse extra-utérine, endométriose).
Avant tout examen complémentaire, c’est donc l’interrogatoire du patient, son histoire, son type de douleur (brûlure, coup de poignard), sa localisation et l’examen clinique par palpation de l’abdomen qui aiguilleront le médecin.
Une brûlure qui remonte vers le sternum, évoque, a priori, un reflux gastro-oesophagien (RGO). Une douleur violente qui s’installe comme une barre au-dessus de l’estomac, irradiant vers le dos et l’omoplate gauche, souvent accompagnée de vomissement et parfois de fièvre, peut-être le signe d’une inflammation du pancréas (pancréatite aiguë), surtout si elle apparaît après un repas très copieux et bien arrosé ou dans un contexte
d’alcoolisme chronique. Localisée d’un seul côté au niveau du flanc, irradiant vers les lombaires, la douleur évoque une infection rénale ou une colique néphrétique. « Au creux de l’estomac ou juste sous les côtes du côté droit, bloquant la respiration, ce peut être une colique hépatique,
surtout chez un patient qui a déjà des antécédents de calculs de la vésicule biliaire », énumère le Pr Dapoigny. Une douleur aiguë dans la fosse iliaque droite évoque une appendicite ; la même à gauche, une diverticulite. « Dans tous ces cas, le tableau clinique est en général si douloureux qu’on attend rarement 3 jours pour consulter son médecin traitant ou, si c’est intolérable, les urgences », explique le gastro-entérologue.


Un examen au-delà de 7 jours de symptômes
Les troubles subaigus, c’est-à-dire à mi-chemin entre l’urgent et le chronique, sont plus problématiques, constate le Pr Dapoigny. Lorsque la douleur semble tolérable, ou variable, et que les signes associés sont ignorés, les retards de diagnostic sont fréquents. » Alors qu’il devrait s’imposer sans trop traîner. « Une diarrhée qui dure plus d’une semaine, ce n’est pas une gastro-entérite. Une affection virale ne dure, par définition, que quelques jours », met en garde le Dr William Berrebi, gastro-entérologue à Paris. Au-delà de 7 jours, une consultation avec examen physique et biologique est nécessaire. La cause peut être bactérienne. Si ce n’est pas le cas, une coloscopie ou endoscopie digestive sera prescrite. En effet, un trouble du transit persistant peut signaler une maladie inflammatoire chronique des intestins ou une tumeur du côlon (plus d’un quart des cancers sont d’origine digestive).
Même réflexe en présence de sang dans les selles : « alors que la moitié des plus de 50 ans souffre d’hémorroïdes, 30 % seulement consultent, c’est un problème », déplore le Dr Berrebi. « Les hémorragies hémorroïdaires sont tellement banales que ce signe d’alarme est négligé », confirme le Pr Dapoigny. Il peut pourtant signaler une pathologie inflammatoire ou une tumeur du côlon. Ce type de tumeurs se soigne d’autant mieux qu’il est pris en charge tôt. L’Institut national du cancer constate 90 % de guérisons lorsqu’il est limité à la surface interne du colon ou du rectum. Il a beau faire l’objet de campagnes de sensibilisation et d’un dépistage organisé à partir de 50 ans, il est, comme l’ensemble des cancers digestifs, en augmentation. « Il tue encore près de 6 fois plus que les accidents de la route », prévient le Pr Frank Zerbib chef de service d’hépato-gastroentérologie et oncologie digestive au CHU de Bordeaux. « La modification des modes de vies et des habitudes alimentaires, qui nous poussent
à maltraiter de plus en plus notre tube digestif, ainsi que le surpoids et l’obésité sont des facteurs de risque qui contribuent à l’expliquer », avance le Pr Zerbib, alarmé comme ses confrères de voir grimper la fréquence des cancers du côlon chez les 20-50 ans, et en particulier chez des moins de 30 ans.

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